40

Amy et Nicole venaient de faire disparaître le repas du matin lorsque l'air se mit à vibrer dans le chalet artificiel. Instinctivement, elles se précipitèrent sur leur Béthanie et Mélissa, assises sur le grand sofa, pour les protéger. Les adolescentes arrêtèrent leurs bavardages pour tendre l'oreille, comme les adultes. Hélène déposa le tricot sur lequel elle travaillait depuis son réveil. Contrairement aux femmes, qui s'étaient réfugiées près des murs, Donald demeura debout au milieu de la pièce.

— Que se passe-t-il ? demanda Hélène.

— On dirait que la magie d'Alissandre s'effrite, murmura Béthanie.

— Pourquoi es-tu toujours aussi négative ? se troubla Mélissa.

— Je ne suis pas négative, je suis réaliste. Regardez le plafond.

Il semblait s'être liquéfié ! Des ondes concentriques s'éloignaient les unes des autres à partir du centre de la vaste surface.

— On dirait que quelque chose est sur le point de sortir de là, remarqua Donald, de plus en plus inquiet.

— Et si c'était le sorcier ? s'étrangla Amy. Il n'y a aucune façon de sortir d'ici.

— Pourquoi les livres magiques sont-ils silencieux tout à coup ? demanda Hélène.

Béthanie voulut quitter la sécurité des bras de sa mère, mais cette dernière resserra son emprise.

— Maman, je suis peut-être la seule à pouvoir nous sauver.

— Pas avec une épée.

— Non, avec de la magie.

— C'est trop dangereux, ma chérie.

— Amy, laisse-la aller, lui conseilla le médecin. Elle est beaucoup plus à l'aise que nous avec ces trucs bizarres.

L'adolescente se dégagea et s'approcha de la bibliothèque en scrutant le plafond aux formes ondoyantes. Habituellement, on observait les étangs en regardant vers le bas. Il était vraiment curieux d'en avoir un au-dessus de la tête. Béthanie se planta devant l'impressionnante collection de grimoires du magicien.

— Dites-moi ce qui se passe, exigea-t-elle sur le même ton autoritaire que Terra.

Les livres frétillèrent sur les étagères sans prononcer un seul mot.

— Vous êtes certainement au courant de ce qui nous arrive. Vous n'avez pas le droit de nous cacher la vérité, même pour nous épargner.

— Le portail est en train de s'ouvrir, lui apprit finalement un vieux recueil à la couverture tout usée.

— Le portail vers quoi ?

— Celui vers l'extérieur, évidemment.

— Donc, quelque chose essaie d'entrer ici.

— C'est une hypothèse plausible.

— Comment pourrais-je savoir de quoi il s'agit ?

Les livres se mirent à se consulter. En attendant leur réponse, Béthanie se mit à marcher en rond en cherchant à localiser le centre exact de l'étrange fontaine du plafond.

— Lorsqu'il revient chez lui, Alissandre apparaît-il sur la grande table ? demanda-t-elle.

— Juste un tout petit peu en retrait, affirma le recueil.

— À quoi cela te sert-il de le savoir ? s'étonna Mélissa.

— J'essaie d'imaginer un piège…

— Tu crois que ça se passera comme dans les jeux vidéo et qu'en pressant sur un simple bouton, tu réussiras à nous éviter le pire ?

— Ce n'est pas moi, la maniaque de ces quêtes électroniques.

— Les filles, ce n'est pas le moment, trancha Donald. Si tu as une idée géniale, Béthanie, je te suggère de nous en faire part maintenant.

Elle se tourna une fois de plus vers la bibliothèque.

— De quelle façon pouvons-nous empêcher un sorcier d'entrer ici ? s'enquit-elle.

Les livres se mirent à trembler à l'unisson.

— Y a-t-il une potion ou une incantation qui nous permettrait de lui bloquer l'accès à cette pièce ?

— Il me semble avoir déjà vu…

Une déflagration secoua alors la caverne, projetant Donald et Béthanie sur le sol et arrachant des cris de terreur à Amy. Seule Hélène demeura figée et silencieuse. Comme ils le redoutaient, une masse en forme d'œuf traversa la membrane liquide et s'écrasa sur la table. Donald s'empressa de se relever et d'aller se placer devant celles qu'il avait juré de protéger.

Béthanie, qui maîtrisait toujours sa peur avant tout le monde, s'approcha du cocon immaculé en écarquillant les yeux. Le sorcier leur avait-il envoyé une larve de monstre ? Elle tendit prudemment la main pour toucher sa surface huileuse, mais ne l'atteignit pas. L'œuf s'ouvrit d'un seul coup, la faisant tressaillir. Il ne contenait pas une abomination malfaisante, mais un pauvre magicien trempé de la tête aux pieds, qui grelottait comme si on venait de le sortir d'un réfrigérateur plutôt que d'un couvoir.

— Alissandre ? s'exclama-t-elle.

Le reste de la bande se précipita pour constater les dires de l'adolescente.

— Attention, c'est peut-être un piège, les avertit Donald.

— Est-ce votre véritable maître ? demanda Béthanie à tous les livres, qui s'étaient dangereusement penchés au bord des tablettes.

— Oui, oui, c'est lui ! s'égaya son journal intime.

Les plis des vêtements blancs de l'immortel étaient carbonisés, La peau de son visage et de ses mains montrait des traces de brûlures graves.

— Aidez-moi, implora Donald en se tournant vers Hélène.

— Dégagez, je vous prie, fit la femme médecin en reprenant son sang-froid.

Nicole obligea Amy, Béthanie et Mélissa à reculer pour leur permettre de faire leur travail.

— Ciseaux ! ordonna Hélène.

Ils apparurent aussitôt dans ses mains.

— Ce serait vraiment pratique dans la salle d'opération, ne put s'empêcher de commenter Donald.

Hélène tenta de découper la tunique de l'immortel à partir de son cou pour découvrir sa poitrine, tandis que Donald inspectait les plaies sur ses bras.

— Je n'y arrive pas, l'informa la femme médecin. On dirait du caoutchouc.

Donald essaya à son tour et dut en venir à la même conclusion.

— Mes vêtements n'existent pas dans votre réalité, murmura Alissandre d'une voix tremblante.

— Comment sommes-nous censés te venir en aide si nous ne pouvons pas examiner tes blessures ?

— Donnez-moi juste un petit moment…

Impuissants, les deux praticiens firent ce qu'il demandait. Sous leurs yeux, les brûlures se mirent à disparaître, les unes après les autres, y compris celles sur sa tunique, Alissandre parvint également à s'asseoir sur la table et laissa pendre ses jambes sur le côté.

— Que s'est-il passé ? Pourquoi es-tu dans un état aussi lamentable ? s'exclama Donald.

— J'ai affronté le sorcier en duel.

— Dis-moi qu'il est encore plus amoché que toi.

— Il est mort.

— Toutes mes félicitations !

— Malheureusement, nous ne pouvons pas encore nous réjouir.

— Ne me dis pas que c'est un phénix capable de renaître de ses cendres.

— Le jeu comporte un grand nombre de règles, et l’une d'entre elles énonce que si le roi noir n'a pas été mis en échec, le sorcier peut s'emparer de son corps s'il est détruit par le magicien lors d'un duel.

— Dans ce cas, ne perdons pas de temps et trouvons ce personnage !

— Tout ce que j'ai réussi à extraire des pensées de mon rival avant qu'il ne brûle sous mes yeux, c'est que ce roi était un citoyen de Nouvelle-Camelot.

— Laisse-nous sortir d'ici, Alissandre. Nous ne le démasquerons jamais en restant enfermés dans ta caverne.

Ils observèrent le magicien en silence tandis qu'il rassemblait toute sa puissance. Ses vêtements devinrent de plus en plus lumineux, puis éblouissants. Les humains protégèrent leurs yeux pour ne pas être aveuglés. Lorsqu'ils les rouvrirent, ils constatèrent qu'ils étaient de nouveau dans l'autocaravane.

— Quoi ! explosa Donald. Comment allons-nous mettre rapidement la main au collet de ce roi si je suis obligé de ramener le motorisé au Canada ?

— Attendez une minute, fit Béthanie en regardant dehors. Je connais cette forêt.

Elle sortit du véhicule, aussitôt suivie des autres, et tourna sur elle-même en s'orientant.

— Nous sommes à dix minutes de Caer Nobilis ! Le vieux magicien m'a dit que nous aurions besoin de l'aide d'une magicienne qui vivait au Canada. Il faut la trouver.

— C'est vaste, le Canada, lui rappela le médecin.

— Elle s'appelle Thuia.

— J'ai soigné absolument tout le monde à Nouvelle-Camelot et je peux t'assurer que personne ne porte ce nom.

Elle habite tout près d'ici, fit la voix de Markvart dans la tête de Béthanie. Empruntez le sentier droit devant. Il débouche sur sa maison.

— Suivez-moi ! lança l'adolescente.

— Béthanie, il ne s'agit pas d'une quête comme celles auxquelles tu participes avec les élèves de Galahad, l'avertit Amy. Ne nous fais pas perdre de temps.

— Faites-moi confiance.

Sans attendre leurs protestations, Béthanie s'élança entre les arbres. Donald grommela de mécontentement, mais fut le premier à lui emboîter le pas. Le sorcier ne les menaçait plus, en principe, mais il ne voulait pas non plus qu'elle se retrouve face à face avec son roi noir.

Ils coururent à en perdre haleine jusqu'au jardin de la maison d'Eisa Goldstein.

— C'est ici, annonça fièrement Béthanie.

— Chez la mairesse ? s'étonna Nicole.

L'adolescente poursuivit sa route vers la porte et s'arrêta net lorsqu’Eisa vint à sa rencontre. Elle portait une longue robe noire et prune, lacée sur la poitrine et retombant en une multitude de voiles jusqu'à ses chevilles.

— Madame Goldstein ? voulut vérifier Donald.

— On m'a prévenue de votre arrivée, leur dit-elle avec un sourire aimable.

— Comment ? Nous ne savions pas nous-mêmes que nous nous dirigions ici.

— Vous avez des amis dans le monde invisible.

— Êtes-vous bien la mairesse de la ville ?

— Vous êtes un ami du roi Arthur et de son magicien, et vous vous étonnez de découvrir que j'ai peut-être une double personnalité ?

Cette affirmation cloua le bec au médecin.

— Nous n'avons pas de temps à perdre si vous voulez revoir ceux que vous aimez, poursuivit-elle. Venez.

Elle les emmena dans son salon et leur demanda de s'asseoir. Hélène, autrefois sceptique, fit ce que la jeune femme demandait. Son seul désir était de revoir son fils.

— Prenez vos mains en formant un cercle, ordonna la mairesse.

— Ce ne sont pas des morts que nous voulons voir, mais des vivants, protesta Amy.

— Il ne s'agit pas d'une séance de spiritisme, rassurez-vous. J'ai besoin de votre énergie.

— Est-ce nous qui allons mourir ? s'effraya Mélissa.

— Je ne vous prendrai rien que vous ne voudrez pas me donner, assura Eisa. Toute crainte que vous pourriez avoir maintenant nuirait à ma magie.

— Mélissa, si tu as peur, va t'asseoir plus loin, lui recommanda sa mère.

L'adolescente ne se fit pas prier pour sortir du cercle. Elle alla se pelotonner sur un moelleux fauteuil en priant le ciel que toute cette aventure prenne fin au plus vite. Elle avait envie de revoir Aymeric et de poursuivre sa vie comme avant, sans soucis et sans sorcier.

Béthanie, quant à elle, commençait à vraiment aimer le monde surnaturel et l'exaltation qu'il lui procurait. Lorsque cette affaire serait terminée, elle s'informerait auprès de Galahad sur la façon de devenir magicienne.

— Chassez toute appréhension et respirez le plus normalement du monde, recommanda Eisa. Vous devez être libres et confiants.

Donald trouva l'exercice plus contraignant que ses compagnes, car il avait tendance à continuellement s'inquiéter pour ses semblables. Il se mit donc à s'imaginer flottant à travers les nuages, libre comme un oiseau.

— Très bien, les félicita la mairesse quelques minutes plus tard. Je vois que votre première préoccupation est de ramener vos êtres chers à Nouvelle-Camelot.

Béthanie voulait aussi découvrir l'identité de la personne qui risquait d'héberger le sorcier dans son cœur, mais elle se doutait bien qu'elle n'y arriverait pas sans son père et ses amis.

— Visualisez dans votre esprit les visages de ceux qui doivent rentrer à la maison. Je m'occuperai du reste.

Hélène ne pouvait mettre en images que les traits de son fils et de Terra, car elle ne connaissait pas les autres participants de la quête. Toutefois, Donald, Nicole, Amy et Béthanie se chargèrent de se représenter ceux de Galahad, de Marco et d'Aymeric.

— Je les vois, annonça Eisa.

Ils sentirent alors une grande chaleur entre leurs doigts, tandis que l'oréade rappelait à elle ceux qui l'avaient aidée à débarrasser le monde de la plus grande menace de tous les temps.

— Ils sont tout près, maintenant.

Une formidable explosion secoua la maison. Mélissa plongea dans les coussins du fauteuil voisin en hurlant de terreur. Le reste du groupe ouvrit les yeux.

— Qu'est-ce que c'est ? s'alarma Donald.

— Dites-nous que ce n'est pas le sorcier, supplia Nicole.

— Vous pouvez cesser de tenir vos mains. Ils sont ici.

— Où ? s'égaya Béthanie.

— Devant la maison.

L'adolescente se précipita à la fenêtre et écarquilla les yeux en apercevant, presque couché sur le côté, un bateau ancien d'une trentaine de mètres de long. À son bord, trois hommes vêtus de surcots blancs se relevaient avec difficulté. Deux d'entre eux semblaient protéger quelqu'un dans leurs bras. Les adultes s'agglutinèrent derrière Béthanie. Ils observèrent la scène un instant sans la comprendre.

— C'est papa ! s'exclama finalement la jeune fille lorsqu'il se tourna enfin vers elle.

Elle décolla comme une fusée en direction de la porte, qu'elle fit claquer contre le mur en l'ouvrant avec précipitation. Terra venait de mettre les pieds sur l'asphalte lorsque Béthanie jeta ses bras autour de lui.

— Où sommes-nous ? s'étonna-t-il.

— À Caer Nobilis ! Vous êtes enfin rentrés chez nous !

Remarquant finalement le sang sur les vêtements de son frère, que Terra portait dans ses bras, Béthanie repoussa les mèches blondes collées par la sueur sur son visage.

— Est-il vivant ? s'effraya-t-elle.

— Oui, mais il est très mal en point. J'ai besoin d'un médecin.

— Ça tombe bien, déclara Donald en arrivant à la hâte. Il y en a deux ici.

Il cueillit Aymeric dans les bras de son père, qui tremblait sous l'effort, puis se dirigea vers la maison de la mairesse, Amy sur les talons. L'autre adolescent était en bien meilleur état, alors Marco le déposa sur le pavé. Jacob vit les adultes accourir et reconnut un seul visage parmi eux.

— Maman ! s'écria-t-il, soulagé.

Hélène l'attira dans ses bras et le serra à lui rompre les os en pleurant toutes les larmes de son corps.

— Je te jure que je n'ai pas fugué, fit Jacob.

— Je sais, mon trésor.

— Où sommes-nous ?

— Je ne me souviens plus du nom de la ville. Je sais seulement que c'est en Colombie-Britannique, où habite ton père.

— Il est aussi formidable que tu le disais, maman, même si nous n'avons pas eu beaucoup de temps pour bavarder.

— S'il le veut bien, nous passerons deux ou trois jours ici pour vous donner le temps de faire plus ample connaissance.

— Ce serait vraiment génial. Je t'aime tellement, maman.

— Pas autant que moi, caneton.

Elle ramena son enfant vers la maison en le gardant serré contre elle et en se jurant que plus rien ne le lui enlèverait. Tout le monde avait suivi Terra à l'intérieur, même Marco. Il ne restait que Galahad aux abords du dromon. Béthanie s'approcha de lui.

— Ne me dites pas que vous percevez une menace, chevalier, hasarda l'adolescente.

— Non, rien de tel. Je me remémorais ce que nous venions de vivre.

— Où naviguiez-vous ?

— Nous venions d'accoster en Italie. L'équipage et les templiers étaient sortis du bateau lorsque nous avons été transportés dans une trombe d'eau.

— C'est leur uniforme que vous portez, n'est-ce pas ?

— En effet. C'est tout ce qu'Alissandre a trouvé sur le champ de bataille. Pour tout te dire, j'en suis très fier. Combien de soldats modernes peuvent-ils se vanter d'avoir combattu aux côtés de ces guerriers légendaires ?

— Vous avez eu beaucoup de chance.

L'embarcation disparut aussi subitement qu'elle était apparue dans la rue.

— Heureusement que vous en êtes descendus, laissa tomber Béthanie.

En marchant vers la maison, elle lui raconta leur court voyage en Californie, leur arrêt chez Hélène Deux Lunes dans la réserve, la rencontre avec le sorcier et leur séjour dans l'antre du magicien jusqu'à son retour, ainsi que l'intervention d'Eisa Goldstein.

— Il a triomphé du sorcier ? s'égaya Galahad en pénétrant dans la demeure de la mairesse.

— Oui, mais si nous ne retraçons pas le roi noir très bientôt, il pourrait bien prendre possession de son corps.

— Et tout serait à recommencer…

Ils trouvèrent les autres dans la salle à manger, où on avait déposé Aymeric sur la table, Eisa était penchée sur ses blessures au cou, l'air soucieux.

— Ce ne sont pas des plaies ordinaires, murmura-t-elle comme si elle se parlait à elle-même.

— Dites-nous ce que nous pouvons faire pour lui venir en aide, insista Terra.

— La médecine ne pourrait pas le délivrer du sort qui les accompagne. Je dois le faire seule. Ne le déplacez pas pendant que je rassemble ce dont j'ai besoin.

Elle quitta momentanément la pièce. Posté près de la tête de son enfant, Terra glissait ses doigts dans ses mèches blondes sans prêter attention à ce qui se passait autour de lui. À l'autre bout de la table, Hélène gardait Jacob collé contre elle. Ils observaient tous les deux le Hollandais qui avait si brièvement traversé leur vie.

Nicole serrait la main d'Amy pour lui donner du courage. Les bras croisés, Donald était debout à côté de Terra. Il détestait s'avouer impuissant devant le mal qui rongeait Aymeric. Quant à Galahad, il préféra rester à l'entrée de la salle à manger, près de Marco et Béthanie. Contrairement à la plupart des gens, le chevalier parfait savait quand agir et quand s'abstenir de le faire. Cette situation, même si elle était grave, ne requérait pas son intervention. Il se tenait toutefois prêt à agir au besoin. Béthanie trouva plus difficile que lui de ne pouvoir rien faire. Tout ce qu'elle voulait, c'était retrouver le roi noir et lui régler son compte au plus vite.

Eisa revint une minute plus tard avec quelques fioles qui contenaient des liquides. Elle déboucha la première et versa quelques gouttes dorées sur les cinq plaies dans le cou d'Aymeric. Rien ne se produisit. Elle refit la même opération avec les bouteilles verte et argent. L'adolescent sursauta comme si on l'électrocutait ! Amy fit un pas en avant pour aller réconforter son enfant, mais le traitement n'étant pas terminé, Nicole freina son élan. Juste derrière Aymeric, Terra demeurait impassible, priant pour que son fils sorte enfin de son coma. Eisa attendit que cessent les convulsions, puis leva les yeux vers le père.

— C'est à vous de jouer, guérisseur.

Terra ne se fit pas prier et appuya ses deux mains sur les lacérations causées par les ongles du sorcier. Ses doigts s'illuminèrent l'espace d'une seconde.

— Le Mal l'a quitté, assura la mairesse. Vous pouvez le ramener à la maison.

— Merci mille fois, hoqueta Amy.

— Il n'est pas question que nous marchions jusque-là, décida Donald. Je vais aller chercher le motorisé pendant que Terra reprend des forces.

Galahad, Marco et Donald aidèrent le Hollandais à sortir de la maison par la porte du jardin et le plantèrent devant un grand chêne, qui le prit aussitôt dans ses branches. Galahad jeta un coup d'œil du côté du sentier sur lequel le médecin venait de s'engager.

— Vas-y, l'encouragea Marco. Je veille sur Terra.

Le chevalier s'élança à la suite de son ami.

— Cet uniforme te va à merveille, le complimenta Donald.

— Merci. J'ai toujours rêvé de le porter La vie fait bien les choses, on dirait.

— Comment ça s'est passé pour vous ?

— C'était aussi éprouvant qu'il y a quinze ans, peut-être même un peu plus en raison de notre âge. Béthanie vient d'ailleurs de m'apprendre que le sorcier pourrait prendre une nouvelle forme, même après sa mort.

— C'est ce que prétend Alissandre. Tu avais démasqué le roi noir la dernière fois. Tu devrais être capable de répéter cet exploit, non ?

— Il est certain que je vais passer les prochains jours à ratisser Nouvelle-Camelot. Mais je me doute déjà de son identité.

— Le type qui t'a empoisonné ?

— Oui, lui.

— Mais il est disparu dans la brume, Galahad.

— Même s'il se cachait sous terre, je serais capable de le retrouver.

— Si tu veux, je te donnerai un coup de main.

Ils ramenèrent le gros véhicule devant la maison de la mairesse, où les y attendaient leurs amis. Terra déposa Aymeric sur le grand lit, et tous les autres s'entassèrent sur les sièges et les fauteuils. Il était illégal de transporter autant de passagers dans un motorisé, mais Caer Mageia se situait à quelques minutes à peine de Caer Nobilis.

Donald laissa d'abord sa propre famille chez lui, puis alla reconduire les Wilder, qui hébergeraient temporairement Hélène et Jacob. Il fila ensuite vers la cité et déposa Marco devant sa maison. Il ne restait plus que Galahad à mener à son château.

— Je commencerai mes recherches tôt demain matin, annonça le chevalier lorsqu'il descendit finalement du véhicule.

— Appelle-moi quand tu seras prêt.

Galahad acquiesça d'un signe de tête, comme il avait l'habitude de le faire. Il regarda s'éloigner l'autocaravane, puis se retourna vers l'entrée de sa demeure. Il n'avait pas fait un pas que la porte s'ouvrait brusquement devant lui. Chance s'élança et l'étreignit avec force.

— J'ai eu si peur de ne jamais te revoir, pleura-t-elle dans ses bras.

— Tu as si peu confiance en mes talents ? la taquina-t-il.

Il la souleva dans ses bras et la ramena à l'intérieur. Il prit place sur son fauteuil préféré et l'embrassa pendant un long moment.

— Raconte-moi tout ! exigea-t-elle.

Il commença son récit dans le salon, puis le poursuivit dans la salle de bain, tandis qu'elle le débarrassait de ses nouveaux vêtements.

— Je ne comprends pas pourquoi nous sommes arrivés au XIIIe siècle nu comme des vers et qu'au retour, nous avons pu conserver les vêtements que nous avions trouvés là-bas, fit-il soudain en se lavant les cheveux.

— C'est pourtant très simple. Vos vêtements modernes n'existaient pas dans le passé, tandis que ceux du passé peuvent très bien s'être rendus jusqu'à aujourd'hui, comme cela arrive souvent dans les musées, par exemple, à la différence que ceux-ci sont en très bon état.

Elle les expédia dans la chute qui donnait sur la salle de lavage, mais garda la cotte de mailles, qu'elle avait du mal à soulever.

— Comment faites-vous pour vous battre avec des trucs pareils ? grommela-t-elle en la laissant tomber sur le plancher.

— C'est une question d'habitude.

Ce qu'il aimait le plus chez Chance, c'était son inépuisable compréhension. Elle ne partageait pas tous ses goûts, mais elle ne tentait jamais de lui faire changer les siens. Elle le laissait vivre dans son monde de chevalerie et de combats et, de son côté, il la laissait évoluer dans son univers de musique classique.

Lorsqu'il fut propre comme un sou neuf et enveloppé dans un peignoir en molleton, il l'attira une fois de plus contre lui.

— Aurais-tu oublié de me dire quelque chose avant mon départ ?

— Je me doutais que tu le devinerais, mais je ne voulais pas que cette nouvelle te cause de la distraction.

— Comment se fait-il que tout à coup nous y arrivions, alors que nous avons tout essayé pendant quinze ans ?

— C'est souvent lorsqu'on lâche prise qu'on obtient des résultats. Nous avons cessé d'y penser, et voilà. Es-tu capable de me dire si c'est une fille ou un garçon ?

Il plaça les mains sur son ventre et ferma les yeux.

— C'est un garçon. Je vais être père d'un petit chevalier.

— Une fille aurait pu l'être tout autant, Galahad Dawson !

Comme il n'avait pas du tout envie d'avoir une autre discussion avec elle sur les droits des femmes dans la société du XXIe siècle, il s'empara de ses lèvres et l'embrassa passionnément.

Capitaine Wilder
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